Rencontre avec Romain GERARDIN-FRESSE, expert juridique spécialiste des stratégies d’entreprise et éditorialiste politico-économique

Expert juridique de renommée internationale, Romain GERARDIN-FRESSE est également éditorialiste politique et économique pour des magazines élitistes en la matière.
Nous avons rencontré ce diplômé en sciences politiques et en droit des affaires, afin qu’il nous livre son sentiment sur notre système éducatif et l’accès aux grandes écoles.

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Objectifgrandesecoles : Votre parcours éloquent vous a conduit à diriger aujourd’hui un cabinet réputé. Diplômé en sciences politiques mais aussi en droit des affaires, vos deux formations vous sont-elles profondément utiles dans l’exercice de vos missions ?

 

Romain GERARDIN-FRESSE :

Indubitablement.
Il est vrai qu’au premier abord, il est légitime de s’interroger sur l‘utilité d’un diplôme en sciences politiques, pour conseiller des chefs d’entreprises.
Il faut en premier lieu rappeler que mes fonctions actuelles sont en réalité l’aboutissement d’un parcours qui a trouvé son essence dans le conseil de personnalités publiques, où la sémantique diplomatique et la connaissance des stratégies d’ordre politique étaient indispensables.
Cependant, il y a un lien latent entre la mise en place des restructurations d’entreprises que je développe aujourd’hui et la gestion des situations de crise, notamment en termes de stratégie et de communication, avec le raisonnement qui est attenant aux sciences politiques.
Les méthodes d’approche d’une problématique, et les cheminements intellectuels qui conduisent à sa résolution font appel à tous les principes de bases développés dans une formation de cet ordre.
Quant à l’enseignement du droit, outre la rhétorique qu’il inculque, il est indispensable afin que les conseils apportés soient pertinents et parfaitement conformes avec les prescriptions légales.

 

Objectifgrandesecoles : Que pensez-vous de notre système éducatif français, et de la notion de clivage entre le système universitaire et les grandes écoles ?


Romain GERARDIN-FRESSE :

D’une manière générale, le système éducatif français public a connu une paupérisation dangereuse ces dernières années, induisant un déficit de confiance au profit des établissements d’enseignement privés.
Si les formations dispensées en université sont souvent de qualité, reconnaissons-le tout de même, les modalités de validation des cursus, parfois algorithmiques et nébuleuses, peuvent conduire certains employeurs à ne pas estimer le travail fourni par les étudiants tout au long de leur cycle universitaire à leur hauteur légitime.
Dans un même domaine, il est incontestable qu’entre une licence et un Bachelor, à niveau d’étude équivalent, nombre d’employeurs vont privilégier le second, sous réserve tout de même que l’école l’ayant délivré jouisse d’une réputation honorable.
Pourtant cela ne présage pas de la qualité de l’étudiant.
Il était indispensable que l’on redonne ses lettres de noblesse à l’Université.
Charles ROLLIN écrivait que « L'université de Paris, la mère de toutes les autres, et si digne par son antiquité, par sa réputation… d'être favorisée particulièrement par les princes et par les grands seigneurs, »
Et ce n’est pas le cas uniquement de celle de Paris d’ailleurs.
Le soulèvement contre la sélection à l’entrée des universités est, à mon humble avis, un non-sens.
Les diplômes universitaires sont dévoyés car on considère justement qu’en l’absence de système sélectif, la consécration diplômante du pot commun laisse présager d’un niveau moyen, alors que tel n’est pas nécessairement le cas.
Dans l’imaginaire collectif, les formations universitaires sont moins valorisantes que les diplômes délivrés par les grandes écoles.
C’est le cas parce que les employeurs, qui sont constitutifs de l’offre, sont nombreux à le considérer.
Mais le département de sciences politiques de Nice-Sophia Antipolis par exemple, propose des cours d’un niveau très qualitatif, équivalent à ceux proposé par Sciences-Po.

Objectifgrandesecoles : Vous considérez donc que l’aspect sélectif de l’accès à une formation dispensée par une grande école, est un principe qui doit être conservé ?

Oui, c’est une évidence.
Donner la possibilité d’intégrer une grande école sur concours est la manière la plus sûre de garantir le niveau d’excellence qu’elle revendique.
C’est de surcroit un gain de temps pour le corps enseignant, qui peut alors composer avec des étudiants aux bases solides et présentant niveau de connaissance homogène, et cela évite que des étudiants qui pensent pouvoir se voir diplômer de cette école soit in fine déçu s’ils ne valident pas leur cursus.
Car à la sortie du baccalauréat, dont l’obtention est aujourd’hui dépourvue de signification, eu égard à la paupérisation que je vous évoquais tout à l’heure, il est très difficile pour un étudiant d’estimer son niveau réel.
Le concours d’entrée demeure un curseur sérieux.
Cela étant, échouer au concours d’entrée ne signifie pas pour autant que vous n’êtes pas destiné à intégrer l’école sur laquelle s’est portée votre choix, cela peut tout simplement signifier que vous n’y êtes pas encore prêt.
On a vu nombre de candidat échouer une ou deux fois avant de réussir à intégrer l’établissement qu’ils souhaitaient, et à en sorti diplômés avec brio !

Objectifgrandesecoles : Considérez-vous qu’une fois son cursus validé, l’étudiant est prêt à se lancer sur le marché du travail et à y trouver tout sa place ?


Romain GERARDIN-FRESSE :


Je ne le pense pas.
Le monde du travail est un sujet complexe, aux paradigmes multiples.
Etre parfaitement compétent en théorie ne signifie pas nécessairement pour autant que vous aurez les facteurs humains et relationnels nécessaires à une réussite professionnelle.
L’expérience demeure la clé d’un épanouissement et d’une aisance dans l’exercice de votre mission.
Je suis un fervent partisan des stages en entreprise, car je suis intimement convaincu qu’ils sont le facteur prépondérant d’une entrée réussie dans le monde du travail.
Je suis en accord total avec les écoles qui accordent une importance appuyée aux stages d’immersion, et je considère que leur notation doit faire l’objet d’un coefficient au moins équivalent à celui de la formation théorique.
Pour conseiller assidûment beaucoup d’entrepreneurs, et pour les assister notamment dans leurs campagnes de recrutement, un stage dans une entreprise prestigieuse ou formatrice par sa particularité permet de couper court à toute objection formulée par un employeur qui dit rechercher avant tout de l’expérience.
Par ailleurs, la mise à jour constante de ses acquis et l’entretien de sa curiosité intellectuelle par le suivi de formations tout au long de sa carrière sont également la pierre angulaire de l’excellence professionnelle.

Plus d'infos sur Romain Gérardin Fresse

GFK Conseils - Juridis : cabinet fondé par Romain Gérardin Fresse

Participations diverses : Les Echos, NddCamp, Contrepoints

 

Propos recueillis par Blandine MONTSERAC DE CAILLEFONT